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La beauté des laides - Nissan S Cargo : le drôle d'escargot qui a inventé le néo-rétro

Dans Rétro / Géants de l'industrie

Michel Holtz

On peut estimer qu'elle est affreuse, mais on peut aussi lui trouver de vraies références esthétiques et historiques. Tracée à grands coups de cercles qui parcouraient ce drôle d'engin de la fin des années 80, la S Cargo rendait hommage à la 2 CV et à Le Corbusier.

Séduits, hilares ou choqués, les badauds se retournent sur le Nissan S Cargo. Ce qui est peut-être le but de ceux qui l’ont acheté : faire parler d'eux.
Séduits, hilares ou choqués, les badauds se retournent sur le Nissan S Cargo. Ce qui est peut-être le but de ceux qui l’ont acheté : faire parler d'eux.

Qui n'ose rien n'a rien, et qui ose tout pourrait se retrouver bête comme chou. Cette formule, Naoki Sakai aurait pu la faire sienne lorsque le designer japonais a convaincu Nissan de produire une série de quatre voitures néo-rétro entre 1985 et 1989.

Son idée, comme toutes les grandes idées, est toute simple. Elle consiste à créer des autos qui sortent réellement du lot par rapport aux modèles du moment, mais de les produire en peu d'exemplaires et de les réaliser sur une base déjà existante, et largement rentabilisée. Le constructeur lui dit banco, du moins pour développer des prototypes, et lui donne les moyens de ses ambitions en créant, rien que pour lui et son équipe de dessinateurs et d'ingénieurs un peu fous, la Pike Factory, un labo autonome qui n'a qu'un rôle : se lâcher et créer des voitures funs pour les jeunes.

La BE1, la PAO, la Figaro et l'S Cargo : les quatre curieuses autos créées par la Pike Factory.
La BE1, la PAO, la Figaro et l'S Cargo : les quatre curieuses autos créées par la Pike Factory.

C'est qu'à cette période, Nissan souffre d'une image vieillotte et la direction se dit que le projet de Sakai pourrait bien lui donner un coup de fouet. En 1984, l'équipe se met au travail et un an plus tard, le premier-né sort de la Factory. Son nom ? BE 1. L'auto ne ressemble à rien de ce qui fait le style des années 80, mais plutôt à toutes les voitures des années 60. Au salon de Tokyo, le concept-car attire la foule.

Nissan cède à la bande de furieux de la Pike Factory et accepte de commercialiser l'engin. Mais attention : pas question d'en fabriquer plus de 10 000, sur une base de Nissan Micra. Et ça marche. Le temps de mettre en place la fabrication en petite série et deux ans plus tard, les clients se bousculent au point que le constructeur se voit obligé de procéder à un tirage au sort pour octroyer les modèles. La rançon d'un succès qui va donner naissance à un genre : le Pike car, encore appelé "nostalgic modern". En somme, le phénomène qui deviendra le néo-rétro et engendrera la Volkswagen New Beetle et la nouvelle Mini a vu le jour dans l'archipel.

Les quatre icônes de la Factory

Poussé par le succès, Nissan décide de mettre trois autres autos en chantier. La Pao est une R4 revisitée. Quant à la Figaro, c'est un petit cabriolet charmant, lui aussi inspiré du design des années 60. Comme la BE1, ces deux modèles sont produits sur la base d'une Micra. Mais une quatrième auto est fabriquée sur une plateforme de Nissan Sunny, et sa source est beaucoup plus ancienne que la décennie 60.

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Le hublot est en option sur l'S Cargo.
Le hublot est en option sur l'S Cargo.

Elle est présentée au salon de Tokyo. Mais pour cette édition 1987, la bande à Naoki Sakai surprend son monde une fois de plus. L'auto qu'elle dévoile n'est pas vraiment une voiture ludique comme les autres modèles, mais un utilitaire. Son inspiration est double et remonte à l'avant-guerre.

En 1936, l'architecte le Corbusier présente un projet de voiture baptisée Minimum, avec un design ultra-novateur qui restera à l'état de maquette, ne trouvant jamais de constructeur susceptible de la fabriquer. Au même moment, sur le quai de Javel à Paris, au siège de Citroën, les premières esquisses de ce qui sera la 2 CV commencent à prendre forme.

Une maquette de la Minimum de Le Corbusier.
Une maquette de la Minimum de Le Corbusier.

De ces deux ancêtres, Sakai et Yoshiro Kobata, l'autre designer de l'équipe, vont tirer l'S Cargo. Ils vont surtout réinterpréter la courbe de la 2 CV, qui court de l'avant et s'arrête à l'arrière du toit, auquel un grand coffre quasi vertical vient mettre un terme. Mais le dessin extérieur reste très simple, comme l'intérieur sobre et sans aucune fioriture. Toutes les commandes sont regroupées au milieu de la planche où l'on retrouve le levier de la boîte automatique et le compteur.

En regardant le curieux engin, on peut lui trouver une allure d'escargot, et l'équipe qui l'a conçu a évidemment joué sur le mot (et le terme très français) pour bien signifier qu'il s'agit d'une camionnette de livraison urbaine, d'un Small Cargo en quelque sorte. Et même si les Japonais sont peu au fait de la langue hexagonale, les créateurs de l'S Cargo ont tenu par cette coquetterie à rendre hommage à leurs inspirateurs français.

Une clientèle séduite

Pour le moins singulier, le design de l'S Cargo aurait pu rebuter, surtout s'agissant d'un utilitaire, pas vraiment un domaine où les constructeurs vendent du rêve. Mais contrairement à toute attente, la clientèle visée est séduite. Les entreprises de livraison tokyoïtes seraient-elles férues d'histoire du design industriel ? Elles ont plutôt été conquises par le côté spectaculaire de la petite auto de 3,74 m et de 73 ch. Ils ont donc passé commande, persuadés d'être repérés dans la rue, leur marque, collée sur l'engin, étant particulièrement visible. Les livraisons s'effectuent entre 1989 et 1992 et les 12 000 modèles fabriqués, toujours en série limitée selon la politique de la Pike Factory, ont tous trouvé preneur.

Une planche de bord simple et sobre, avec son très apparent levier de boîte auto à trois vitesses.
Une planche de bord simple et sobre, avec son très apparent levier de boîte auto à trois vitesses.

Mais au-delà de la ligne particulière du petit utilitaire, il apporte quelques suppléments que d'autres n'ont pas. Comme cette planche de bord plate qui se transforme en bureau à l'arrêt. Ou la clim de série, ce qui est rarissime dans une camionnette de l'époque. Ces différents éléments expliquent eux aussi le succès de cet OVNI au physique si particulier. Reste que le succès en question est tout relatif puisque, pour nombre de modèles de série, un score de 12 000 ventes est plutôt synonyme de bide.

La fin d'une aventure et le début d'une autre

On pourrait s'interroger éternellement sur le destin de cet S Cargo s'il avait été produit en grande série. L'héritier de Le Corbusier et de la 2 CV aurait-il pu s'écouler correctement dans d'autres pays et sur d'autres continents à des centaines de milliers d'exemplaires, tel un utilitaire classique ? On ne le saura jamais.

En tout cas, au début des années 90, la Pike Factory a fermé ses portes. L'heure est aux économies et Nissan a la tête ailleurs. Le constructeur est plus préoccupé par ses comptes dans le rouge que par le design et les séries limitées. Quelques années plus tard, en 1999, la marque japonaise a dû se résoudre à signer un accord pour s'engager dans une alliance avec Renault. Un nouveau P.-D.G. est désigné, il s'appelle Carlos Ghosn. Mais c'est une autre histoire.

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